Il ne pourra pas dire qu'il n'avait pas été prévenu... Cela fait plusieurs années que les marchés réclament à Carlos Ghosn un plan de succession. L'insuffisante réponse à cette supplique s'est implacablement traduite ce lundi sur le titre Renault. L'action s'est effondrée de plus de 13% après l'annonce de l'arrestation de son PDG au Japon. Celui qui dirige également les conseils de surveillance de Nissan et de Mitsubishi et dirige l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi est soupçonné d'avoir dissimulé au fisc japonais une partie de ses revenus et de s'être livré à des pratiques douteuses. Tel César poignardé par son protégé, Brutus, Carlos Ghosn est notamment accablé par Nissan, l'entreprise dont il a largement contribué au redressement en 1999 et qui lui a valu d'être érigé en Dieu vivant du capitalisme japonais. Le communiqué du constructeur nippon est impitoyable :
« Carlos Ghosn a pendant de nombreuses années déclaré des revenus inférieurs au montant réel. (...) En outre, de nombreuses autres malversations ont été découvertes, telles que l'utilisation de biens de l'entreprise à des fins personnelles », écrit Nissan dans un communiqué avant d'annoncer que le principal intéressé est sur le point de proposer sa démission.
En France, le scandale prendra une ampleur encore plus particulière puisque Carlos Ghosn y était régulièrement attaqué pour son niveau de rémunération, l'un des plus important du CAC 40. Jusqu'en 2017, il gagnait 8,8 millions d'euros au titre de son poste de PDG de Nissan à quoi il fallait ajouter sa rémunération de PDG de Renault soit 7 millions d'euros. C'est en février 2018 que Carlos Ghosn a fini par accepter une baisse de 30% de sa rémunération (côté Renault), sous la pression de l'Etat français.
Emmanuel Macron « extrêmement vigilant »
Derrière le scandale, les enjeux économiques et industriels de cette affaire sont considérables. Au point que le président de la République a dû intervenir en marge d'un déplacement à Bruxelles assurant que le gouvernement serait « extrêmement vigilant » quant à « la stabilité » de Renault, dont l'Etat détient encore 15% du capital. Emmanuel Macron a précisé qu'il serait attentif à la stabilité du groupe mais également à celle de l'Alliance. Pour les investisseurs, la stabilité de l'Alliance repose depuis trop longtemps sur l'autorité charismatique de Carlos Ghosn. Ils craignent que la pérennité de cette union ne survive pas à son chef d'où leurs demandes répétées d'un plan de succession. Carlos Ghosn n'a que très partiellement répondu à cette attente en acceptant de nommer, début 2017, un PDG chez Nissan, Hiroto Saikawa, se contentant de présider le conseil d'administration, puis plus récemment, en nommant un « COO » (numéro 2) à la tête de Renault en la personne de Thierry Bolloré.
Il a fallu que le gouvernement français par la voix de son ministre de l'économie, Bruno Le Maire, se joigne à celle des marchés, pour que Carlos Ghosn accepte d'introniser un dauphin. C'était la condition pour le renouvellement de son mandat. Mais rien n'a été décidé ni prévu pour lui succéder à la tête de l'Alliance. Le patron a accepté de consacrer son nouveau mandat, commencé en mai 2018, à l'établissement d'un plan de succession qui permette de donner une visibilité au delà de son mandat mais également de ses limites d'âge puisqu'à 64 ans, Carlos Ghosn est plus près de la retraite que de la prolongation de carrière.
Son arrestation au Japon a totalement précipité ses plans, et la chute de l'action Renault est proportionnelle aux enjeux industriels encourus par le constructeur automobile français. Le modèle économique du groupe français repose quasi-exclusivement sur son alliance avec Nissan. D'abord, les bénéfices du japonais ont largement contribué à sauver les résultats financiers du français pendant la crise financière de 2008. La valorisation boursière de Renault était d'ailleurs à peine supérieure à la valeur de sa participation de 44% dans le capital de Nissan. Ensuite, Renault partage avec Nissan la plupart, et de plus en plus, de ses plateformes. Ainsi, sur la plateforme CMF on retrouve neuf modèles dont le très juteux Qashqai, le Kadjar, Mégane, Koleos, Talisman...
L'Alliance prévoit de partager 80% de la production mondiale de l'ensemble de ses marques (Renault, Dacia, Lada, Nissan, Infinity, Alpine, Mitsubishi...) sur des plateformes communes, soit des économies de développement considérables. Au-delà, c'est aussi une série de brevets que l'Alliance partageait notamment dans la voiture électrique dans laquelle Nissan avait pris l'initiative bien avant Renault. Il en sera de même dans la voiture autonome, l'intelligence artificielle... Mais également dans les nouvelles mobilités dans laquelle Carlos Ghosn a pris l'initiative d'une très forte offensive. Cette stratégie est développée dans chaque groupe mais elle est pilotée par l'Alliance, sous la direction d'Hadi Zablit. L'Alliance est donc un ciment organisationnel majeur, mais il a le défaut d'être excessivement centralisé autour d'un même homme.
Le Japon fidèle à Ghosn mais pas à Renault...
Les Japonais ont déjà montré qu'ils resteraient loyaux à Carlos Ghosn mais pas nécessairement à Renault. En avril 2015, lorsque l'Etat français est brutalement monté dans le capital du constructeur automobile français afin d'imposer les droits de vote double en assemblée générale, Nissan avait lancé un très sérieux avertissement, indiquant qu'il était inconcevable pour une entreprise japonaise d'être contrôlée par un Etat étranger. L'Alliance est alors au bord de la rupture !
Plus grave, les forces sont largement déséquilibrées entre Renault et Nissan et le rapport de force est clairement défavorable au Français. Le Japonais pèse quasiment deux fois plus lourd et le rapport de force s'est largement creusé après la prise de contrôle de Mitsubishi par le seul Nissan. Si Carlos Ghosn s'est targué d'être à la tête du premier constructeur automobile mondial avec 10,6 millions de voitures par an, devant Toyota et Volkswagen, la réalité est beaucoup plus triviale : l'Alliance n'est en rien un groupe intégré et les synergies, si elles sont importantes ne sont pas suffisantes pour rendre « indétricotables », selon le mot de Carlos Ghosn, cette Alliance. « Toutes les synergies industrielles actuelles sont parfaitement configurables dans le cadre d'un simple partenariat industriel », souffle à La Tribune un analyste fin connaisseur du secteur.
La démission imminente de Carlos Ghosn de la tête de Nissan posera obligatoirement celle de la direction de l'Alliance. Les Japonais voudront certainement imposer un des leurs avec l'argument légitime de son poids économique mais il y a fort à parier que le gouvernement français s'y opposera absolument, rappelant le rapport de force actionnarial, factuellement favorable à Renault qui détient 44% de Nissan, et seulement 15% en sens inverse (et sans droits de vote). La presse a toutefois entrevu une solution en la personne de Didier Leroy, cet ancien collaborateur de Carlos Ghosn, devenu membre du Comité Exécutif de Toyota Motors avec le titre de Vice-Président. Ce Français, très bon connaisseur du secteur automobile japonais, pourrait dès lors être l'homme de la situation. Très sollicité par les médias, ce dernier a jusqu'ici opposé une fin de non-recevoir. La déchéance de Carlos Ghosn pourrait avoir changé la donne. Du moins, la question de sa succession revêt désormais un caractère d'urgence absolue.
Une conjoncture défavorable
Pour noircir un peu plus le tableau, cette affaire survient au moment où le secteur automobile mondial arrive au bout d'un cycle haussier historiquement long. Le marché automobile américain est arrivé à un plus haut et est condamné à stagner voire à régresser un petit peu. En Chine, les croissances à deux chiffres sont définitivement derrière elle. En octobre, le premier marché automobile du monde a même baissé de 11%. En Europe, le marché est proche de son niveau d'avant la crise, tandis que le marché s'est retourné en Amérique Latine.
De plus, l'inflation de normes anti-pollution partout dans le monde nécessite plus que jamais de trouver des synergies en R&D, sous peine de voire ses marges fortement impactées comme l'a récemment annoncé BMW. Carlos Ghosn se targue trop souvent d'avoir bâti une alliance industrielle mondiale, il sera pourtant comptable de son effondrement si celui-ci survenait au plus mauvais moment et que ce soit finalement ses 470.000 salariés dans le monde qui soient les premières victimes...
La Tribune |
Arrêté pour dissimulation de revenus, le patron français pourrait surtout être la victime d'Hiroto Saikawa, l'homme fort de Nissan.
Source AFPS'agit-il d'un « coup d'État du groupe japonais Nissan contre son sauveur ? Alors qu'une alliance plus poussée avec Renault se profilait, certains analystes du secteur estiment cette hypothèse crédible pour expliquer la déchéance soudaine de Carlos Ghosn.
Loin des éloges dont a longtemps été couvert le charismatique dirigeant, Hiroto Saikawa a réécrit l'histoire en « décrivant le redressement comme étant le fruit du travail d'un important groupe de personnes », a commenté Christopher Richter, analyste du secteur automobile au sein de la société de courtage CLSA. Il l'a en outre « qualifié de cerveau de la combine ». « J'ai trouvé ces propos déplacés tant que les faits n'ont pas été complètement établis », dit l'expert.
Au vu du ton adopté, les tensions remontent cependant à bien plus loin que cette année. « Elles couvaient sous la surface au cours des récentes années et ont enfin éclaté de façon brutale », écrit David Fickling, éditorialiste pour l'agence financière Bloomberg News. Au point que Hiroto Saikawa a dû répondre à des questions sur un « coup d'État », une opinion partagée par Nobutaka Kazama, professeur à l'université Meiji de Tokyo. « Il a pu être planifié dans l'espoir de rejeter une intégration à l'initiative de Renault. »
« Il semble y avoir une sorte de frustration et des inquiétudes de la direction », explique de son côté Christophe Richter. « Nissan a des envies d'indépendance », estime-t-il. Aux prémices de l'aventure, Nissan, criblé de dettes, faisait figure de maillon faible. Mais la firme renaît vite de ses cendres, au prix de la sévère restructuration sous l'égide du « gourou » Ghosn. Si elle a été affaiblie par de récents scandales liés à l'inspection des véhicules au Japon, la société affiche des comptes plutôt solides.
Chaque année, sa contribution aux résultats du français est significative, ce qui fait grincer des dents chez les employés japonais, agacés de voir les technologies, la production de certains véhicules (comme la petite berline Micra fabriquée en France) et une partie des bénéfices récupérés par Renault, rapportait au fil des ans la presse nippone.
Des reproches repris mardi par le quotidien économique Nikkei, qui ajoutait qu'après des années d'acceptation silencieuse, « il y avait au sein de Nissan des critiques grandissantes sur les rémunérations excessives de M. Ghosn ». La division s'était accentuée en 2015 après une montée temporaire de l'État français au capital de Renault, une manœuvre qui avait ravivé l'inquiétude au sein de Nissan, et Carlos Ghosn s'était justement donné pour mission de solidifier l'alliance. Renault détient 43 % de Nissan, qui possède quant à lui 15 % du groupe au losange.
« Est-ce que ce bain de sang sera suffisant pour dompter les tensions ? », lance David Fickling. « Il est évident depuis pas mal de temps que Nissan ne souhaite pas d'un changement qui ne refléterait pas sa position centrale dans le groupe. »
Dans ce contexte houleux, le nouveau patron de Nissan semble avoir donc sauté sur l'occasion pour s'émanciper d'un encombrant modèle. « M. Saikawa utilise visiblement les accusations contre M. Ghosn pour accroître son poids sur Nissan et marquer la compagnie de son empreinte », résume Hans Greimel, expert d'Automotive News basé au Japon.
Mitsubishi Motors s'est lui aussi retourné contre celui qui l'a sauvé de la débâcle en 2016 : il a prévu de convoquer rapidement un conseil d'administration afin de démettre Carlos Ghosn de la présidence. Seul Renault, probablement le plus affecté par l'affaire qui touche son PDG, est pour l'instant resté prudent. Mais même s'il n'est pas poussé vers la sortie, Carlos Ghosn pourrait avoir du mal à se maintenir à sa tête.
Carlos Ghosn pourrait passer plusieurs semaines
en garde à vue au Japon
TOKYO (Agefi-Dow Jones)--Si Carlos Ghosn est traité comme un gardé à vue classique au Japon, le dirigeant devrait passer les prochaines semaines en cellule à Tokyo et être interrogé quotidiennement par les enquêteurs sans la présence d'un avocat.
Soupçonné d'avoir dissimulé une partie de ses revenus, Carlos Ghosn, le président de Nissan et le PDG de Renault, a été arrêté lundi à Tokyo. Il n'a pas pu être joint pour un commentaire.
Selon la loi japonaise, au bout de deux ou trois jours après l'arrestation d'un suspect, une prolongation de la garde à vue allant jusqu'à 20 jours peut être demandée à un juge, qui l'accorde généralement. Pendant cette période, le suspect ne peut pas demander de remise en liberté sous caution.
Carlos Ghosn pourrait être détenu encore plus longtemps si le parquet portait de nouvelles accusations contre lui, ce qui remettrait le compteur à zéro. Lundi, Nissan a annoncé avoir découvert "de nombreuses autres fautes graves" qu'aurait commises Carlos Ghosn, en plus de la sous-évaluation de ses revenus dans les déclarations de l'entreprise aux autorités. La seule accusation portée jusqu'ici contre Carlos Ghosn par le parquet est celle d'avoir fait déclarer par Nissan des revenus inférieurs à ceux réellement perçus par le dirigeant.
Carlos Ghosn n'a pas encoré été inculpé. Si cela se produit, il pourra demander sa remise en liberté sous caution dans l'attente de son procès. Mais selon Fumiyuki Takano, avocat du cabinet Adire Legal Professional, Carlos Ghosn pourrait avoir du mal à obtenir sa remise en liberté car le parquet pourrait invoquer le risque qu'il se concerte avec les personnes soupçonnées de l'avoir aidé.
Carlos Ghosn est soupçonné par le parquet d'avoir enfreint une loi japonaise sur les instruments financiers qui prévoit, en cas de culpabilité, une peine allant jusqu'à 10 ans de prison et une amende d'un montant maximum de 10 millions de yens (78.000 euros).
Si Carlos Ghosn est jugé coupable, il ne pourra pas échapper à une peine de prison, d'après Tsutomu Nakamura, un ancien juge qui travaille maintenant dans un cabinet d'avocats. "Cette affaire est plus fâcheuse qu'un cas de fraude comptable dans lequel les entreprises manipulent leurs résultats financiers, car il a tiré un bénéfice personnel de la sous-évaluation de ses revenus", a expliqué Tsutomu Nakamura au sujet des actes imputés à Carlos Ghosn.
-Megumi Fujikawa, The Wall Street Journal
(Version française Lydie Boucher) ed : ECH
Agefi-Dow Jones The financial newswire
Dow Jones Newswires
November 20, 2018 11:53 ET (16:53 GMT)
Avant son arrestation, lundi, au Japon, celui qui avait fait de l'alliance Renault-Nissan le numéro 1 mondial du secteur automobile était aussi admiré que redouté.
1Il a sauvé Nissan et a fait de Renault un leader mondial
Carlos Ghosn, c'est d'abord un industriel à la carrière hors norme, qui s'est taillé une solide image de redresseur d'entreprises en difficulté. Tout a commencé chez Michelin, où il a passé dix-huit années. Il s'y fait remarquer dès 1985, lorsqu'il gère le redressement de la filiale brésilienne de l'équipementier. Cinq ans plus tard, tandis qu'il est à la tête de la filiale nord-américaine, il supervise la fusion avec Uniroyal, que Michelin vient d'accueillir. Fermeture d'usines, suppressions de postes… A chaque fois, le régime est sévère mais efficace. Carlos Ghosn est devenu un redoutable "cost killer", et surtout le numéro 2 du groupe.
Mais l'ambitieux ne veut pas s'arrêter là. N'ayant aucune chance de prendre la tête de Michelin, entreprise familiale par excellence, il se laisse tenter par une autre aventure. En 1996, le PDG de Renault, Louis Schweitzer, le recrute comme directeur général adjoint. Trois ans plus tard, Renault entre au capital de Nissan. Le constructeur japonais est en grande difficulté financière. C'est Carlos Ghosn, nommé à sa tête, qui est chargé de redresser la barre. Au Japon, il applique ses méthodes : 21 000 emplois supprimés, usines fermées… Mais Nissan renaît de ses cendres. En 2005, fort de son succès, le PDG de Nissan devient presque naturellement PDG du vaisseau amiral, Renault.
Chez Renault, Ghosn amplifie l'internationalisation de l'ancienne entreprise publique, impulsée par son prédécesseur. Il développe le "low cost", avec le succès inattendu de la marque Dacia, et abandonne peu à peu le haut de gamme… pour mieux se positionner sur le marché de la voiture électrique, encore balbutiant. Aujourd'hui, Renault est devenu un géant industriel, à la tête d'une alliance qui regroupe pas moins de dix marques, emploie 470 000 salariés et fait tourner 122 usines sur les continents. Ni plus ni moins que le numéro 1 mondial du secteur.
2Il est vénéré au Japon, où il a été le héros d'un manga
Son passage à la tête de Nissan en a fait une star au Japon, un pays où les dirigeants étrangers sont pourtant peu nombreux et peu durables. Le schacho ("président", en japonais) a même eu droit en 2001 à son manga, paru dans un magazine sous le titre L'Histoire vraie de Ghosn-san. Le manga retrace la vie de l'industriel, de son enfance au Liban jusqu'à ses exploits japonais. Pour l'éditeur, il s'agissait de "redonner le moral aux employés japonais déboussolés par la crise économique", relevait alors Libération.
3Il dirige ses troupes d'une main de fer
Derrière ses succès économiques incontestables, Carlos Ghosn cache une véritable main de fer, aux méthodes de gestion dures, souvent critiquées en interne mais aussi par l'Etat français, actionnaire principal de Renault. Il est également perçu comme une sorte d'homme-robot, froid, quasiment sans affect. "Il n'a aucune empathie, il ne donne pas de lui-même. Personne ne le déteste, mais personne ne l'aime non plus", confiait un cadre de Renault au Figaro en 2013.
Chez Carlos Ghosn, la camaraderie n'est jamais vraiment de mise, y compris avec ses collaborateurs les plus proches. "Au point d'appeler en toutes circonstances 'madame' ou 'monsieur' ceux qu'il côtoie depuis des décennies ou avec qui il a vécu l'épopée Nissan de 1999", souligne Le Figaro.
Le PDG de Renault n'hésite pas à couper les têtes qui dépassent. Le 14 août 2013, le numéro 2 du groupe, Carlos Tavares, donne une interview où il fait part de ses ambitions de devenir, un jour, numéro 1, éventuellement chez un constructeur concurrent. Un crime de lèse-majesté ! Deux semaines plus tard, la sentence tombe : Tavares est prié de plier bagages et Ghosn en profite pour nommer deux personnes à son poste. Diviser pour mieux régner, en somme. Il récidive, quelques mois plus tard, cette fois chez Nissan, dont le directeur général et numéro 2, Toshiyuki Shiga, est brutalement remercié.
4Détenteur de trois passeports, il voyage sans cesse
En 2003, alors qu'il n'était encore "que" PDG de Nissan, Carlos Ghosn publiait son autobiographie, intitulée Citoyen du monde (Grasset). Né en 1964 à Porto Velho (Brésil) de parents libanais, Carlos Ghosn a voyagé toute sa vie. De ses 6 ans jusqu'à ses 17 ans, c'est au Liban qu'il étudie, chez les jésuites. Puis, en France, il suit la voie royale des grandes écoles : Polytechnique et les Mines. Comme PDG de Renault et Nissan, ses allers-retours Paris-Tokyo sont incessants. Pas un problème pour cet homme qui aime voyager : "C'est quand je me déplace que je me sens le plus à la maison", assure-t-il.
Dans sa poche, il possède trois passeports (français, brésilien et libanais) et parle sept langues (dont le portugais, le japonais et l'arabe). Sous ses allures posées, Carlos Ghosn est un hyperactif. "Vous ne pouvez pas vivre dans deux pays en même temps, vous ne pouvez pas diriger deux entreprises d'une telle taille, d'une telle complexité, qui demandent une telle attention, en même temps. J'arrive à le faire parce que j'ai quatorze ans d'expérience, expliquait-il au Figaro en 2013. Je me prends trois ou quatre jet lags par mois, je fais des nuits à peu près blanches. Et à la sortie de l'avion, les gens vous attendent : il faut être à 100%."
Cette vie à mille à l'heure l'oblige à une discipline de vie rigoureuse. Au siège de Renault, à Boulogne-Billancourt, près de Paris, il arrive généralement à 7h30 "après avoir déjà travaillé quelques heures". Son agenda est, paraît-il, millimétré, si bien qu'un rendez-vous se programme parfois plus d'un an à l'avance, selon Le Figaro. Le journal précise que le dirigeant ne tolère aucun retard, et qu'il n'en a jamais lui-même.
5Il a survécu à de nombreux scandales, notamment sur sa rémunération
Est-ce grâce à son talent ou à sa poigne ? Toujours est-il que Carlos Ghosn a traversé bien des scandales, sans jamais être fragilisé à la tête de son empire : l'affaire des suicides au Technocentre de Renault en 2007, la mise en cause injustifiée, en 2011, de trois salariés soupçonnés, à tort, d'espionnage industriel, ou encore le Dieselgate, qui s'est traduit pour Renault par l'ouverture en 2017 d'une enquête pour tromperie aggravée.
Mais ce sont surtout ses rémunérations vertigineuses qui défraient régulièrement la chronique. Entre 2009 et 2016, son salaire comme PDG de Renault est passé de 1,2 à 7 millions d'euros, souligne Libération. Une somme à laquelle il faut ajouter sa rémunération comme PDG de Nissan, de l'ordre de 8 millions d'euros par an.
En 2016, les émoluments de Carlos Ghosn agacent jusque dans les rangs des actionnaires de Renault, qui rejettent à 54% en assemblée générale la résolution sur la rémunération de leur PDG. Un vrai coup de semonce, que l'entreprise choisit d'ignorer en confirmant le salaire de Ghosn. L'affaire avait suscité la colère du gouvernement et notamment du ministre de l'Economie de l'époque, un certain Emmanuel Macron.
En 2017, Reuters révèle que des banquiers de l'alliance Renault-Nissan ont élaboré un projet permettant de verser des millions d'euros de bonus annuels supplémentaires à Carlos Ghosn, via une société de service créée spécialement aux Pays-Bas. Une information que le dirigeant dément, se fendant même d'un coup de fil courroucé au directeur de l'agence de presse.
Malgré tout, Carlos Ghosn est invariablement reconduit dans ses fonctions. Début 2018, dernière échéance en date, l'Etat (actionnaire à 15% du groupe) a toutefois posé ses conditions : une réduction de 30% de son salaire et la nomination d'un véritable numéro 2, Thierry Bolloré, pressenti pour lui succéder le jour où il passerait la main.
PS: L'avenir dira peut-être ce qui s'est véritablement passé . Partout dans le monde l'on a " déboulonné " les idoles et les géants .................L'homme éprouve un malin plaisir à détruire ce qu'il adorait hier . Déjà l'ancien testament nous parle du veau d'Or pendant que Moïse écoute Dieu sur la montagne .